Depuis 1994, l’opération été solidaire ne cesse de grandir. D’année en année, ce sont toujours plus de communes partenaires qui, à travers la mise en place d’actions et de projets dédiés à la solidarité et à l’amélioration du confort de vie des citoyens, font rayonner la jeunesse wallonne.
Travaux d’utilité publique, rénovation du petit patrimoine, soutien aux services communaux, sensibilisation à l’environnement, lutte contre l’isolement, … les projets sont aussi diversifiés que les profils des jeunes de 15 et 21 ans qui renforcent chaque année le contingent des jobistes ESOL. La plupart du temps, ces projets leur sont proposés par les accompagnateurs. Mais il arrive que ces derniers les invitent à faire part de leurs idées et à prendre des initiatives pour, au final, développer un projet dans un réel partenariat entre les étudiants et les professionnels qui les encadrent. Une tâche ardue pour une première expérience professionnelle ? Oui, mais au combien valorisante lorsque le résultat est au rendez-vous. A La Louvière, cela fait 3 ans que les jeunes développent les actions ESOL aux côtés des encadrants. Des actions qui changent des vies…
A la rencontre des sans-abris
Venir en aide aux sans-abris et leur apporter un peu de confort, voilà le leitmotiv de 8 jobistes « été solidaire » à l’aube du projet 2021. Accompagnés d’éducateurs et d’assistants sociaux, l’idée de créer des ateliers de rencontre entre jeunes et sans-abri naît d’emblée. « Pour dédramatiser la question du sans-abrisme, pour dépasser leurs peurs et arrêter de croire… que les SDF ne sont pas des gens comme les autres… » nous dit Laura Sarti du PCS louviérois. Des ateliers d’écriture et de photos pour travailler sur l’estime de soi, des tables de discussion et de jeux de société pour faire connaissance, mais avant toute chose, la création d’un restaurant éphémère afin de rencontrer leur public cible autour d’un repas et de présenter leur démarche d’ateliers participatifs.
C’est ainsi qu’en guise de première étape, filles et garçons ont été amenés à dresser une salle tout confort au sein d’un Hall omnisports et à concocter un menu en partenariat avec un restaurateur local. Grâce au soutien de la Croix-Rouge, des abris de jour/nuit et en collaboration avec le Relais social urbain et l’éducateur mobile, des invitations avaient été distribuées en nombre, si bien que ce sont 35 convives qu’ont pu servir les étudiants pour clôturer leur 3ème journée de travail. Une réussite en introduction…
Des débuts timides pour une fin en fanfare
Le lendemain, malgré une faible fréquentation aux ateliers, le groupe de jobiste ne cède pas à la panique et reconsidère leur organisation. Une stratégie qui s’avère payante puisque sur le coup de 14h30 le vendredi, plusieurs sans-abris accompagnés des éducateurs de l’abri de jour se présentent et animent les lieux jusque 20h, moment où ouvrent les abris de nuit. En effet, d’un commun accord, le choix avait été fait de fermer quotidiennement l’abri de jour à 14h30 au profit du local « été solidaire ». Une façon de soutenir le projet tout en étant disponibles pour accompagner les étudiants à la rencontre d’un public qu’ils connaissent bien.
La semaine suivante, forts du dynamisme de fin de semaine et de l’enthousiasme des participants, les étudiants entament la réalisation de leur projet photo. Épaulés par un photographe ayant déjà travaillé au contact de SDF, ils réalisent des portraits noir et blanc d’une bonne partie d’entre eux.
Ensuite, seuls ou en groupe, ils proposent des textes destinés à accompagner les portraits. Sur base des échanges entre les jobistes ESOL et les participants aux ateliers, chacun en rédige un à sa façon. Ils traitent de leurs expériences, leurs vécus, leurs habitudes d’habitants de la rue. Certains rédigent un poème, d’autres une phrase choc. Pour les aider à écrire, un des participants aux talents de rappeur donne même de sa plume. Mais dans quels buts accompagner ces photos ?
Une mise en lumière sur la place communale
Fiers du résultat et de l’accueil réservé par la grosse quinzaine de sans-abri ayant adhéré au projet, une idée trottait en tête du groupe. Suite à l’accord reçu des différents modèles et des autorités publiques, l’occasion était trop belle de présenter les photos durant une exposition de trois semaines sur la place communale.
Imprimées en grands formats et présentées sur des cubes d’expositions aux côtés de leur phrase respective, l’expo est en place et tous trouvent que cela « en jette ». Mais est-ce que le public pensera pareil ? Rien n’est moins sûr pour les sans-abris, dont l’expérience leur porte à croire que les gens se désintéressent d’eux.
Qu’à cela ne tienne, avec les différents partenaires d’ESOL, un appel aux citoyens est lancé sur les réseaux sociaux afin de les inviter à visiter l’exposition et partager leurs impressions. Parmi les jobistes, quelques-uns poursuivent même l’aventure comme bénévoles afin de ne rien rater de l’avancée du projet.
Que cela soit du côté des sans-abri, des jobistes et leurs encadrants ou des partenaires, ils sont unanimes. L’aventure fût trop courte et tous furent marqués par la richesse des rencontres et l’humanité qui a découlé de ces échanges. Les ateliers furent une réussite, le local ESOL a fonctionné à pleine capacité d’accueil la seconde semaine et les retours sur l’exposition furent aussi nombreux qu’inattendus pour les SDF. Pour une idée plus précise de ce à quoi ressemblait l'exposition, visionnez le reportage d'Antenne Centre télévision.
Un projet plein de culot mais calculé
Été solidaire 2021 à La Louvière est une réussite. Et s’il est vrai que le projet aurait pu en freiner plus d’un, son succès n’est pas dû au hasard. Les partenariats étaient bien ficelés, les jeunes ont été préparés à entrer en contact avec les sans-abris à l’aube du projet et débriefaient chaque journée de travail avec les éducateurs après la fermeture. Quant au respect mutuel qui a régné durant cette expérience de deux semaines ? Une charte avait été signée par tous les participants aux ateliers afin de placer des balises et respecter un certain cadre. Simple mais efficace, puisqu’aucun problème n’a été recensé pendant ou après le projet.
Si certaines craintes avaient été soulevées, notamment vis-à vis du comportement imprévisible que peuvent provoquer les addictions dont certains sans-abris souffrent, force est de constater que le travail préparatoire auprès des jeunes et des SDF a fait son effet.
Au final, tous ressortent grandis et changés de cette expérience. De quoi susciter des vocations puisque lors des 2 dernières années d’été solidaire à La Louvière, plusieurs jobistes ont changé d’orientation pour se consacrer, avec réussite, à un cursus scolaire à orientation sociale, tous motivés par leur expérience valorisante dans ce projet !